• Vous pour qui j'écrivis, ô belles jeunes femmes !
    Vous que, seules, j'aimais, relirez-vous mes vers
    Par les futurs matins neigeant sur l'univers,
    Et par les soirs futurs de roses et de flammes ?

    Songerez-vous, parmi le désordre charmant
    De vos cheveux épars, de vos robes défaites :
    "Cette femme, à travers les sanglots et les fêtes,
    A porté ses regards et ses lèvres d'amant."

    Pâles et respirant votre chair embaumée,
    Dans l'évocation magique de la nuit,
    Direz-vous : "Cette femme eut l'ardeur qui me fuit...
    Que n'est-elle vivante ! Elle m'aurait aimée..."

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  • Le soir s'est refermé, telle une sombre porte,
    Sur mes ravissements, sur mes élans d'hier...
    Je t'évoque, ô splendide ! ô fille de la mer !
    Et je viens te pleurer comme on pleure une morte.

    L'air des bleus horizons ne gonfle plus tes seins,
    Et tes doigts sans vigueur ont fléchi sous les bagues.
    N'as-tu point chevauché sur la crête des vagues,
    Toi qui dors aujourd'hui dans l'ombre des coussins ?

    L'orage et l'infini qui te charmaient naguère
    N'étaient-ils point parfaits et ne valaient-ils pas
    Le calme conjugal de l'âtre et du repas
    Et la sécurité près de l'époux vulgaire ?

    Tes yeux ont appris l'art du regard chaud et mol
    Et la soumission des paupières baissées.
    Je te vois, alanguie au fond des gynécées,
    Les cils fardés, le cerné agrandi par le k'hol.

    Tes paresses et tes attitudes meurtries
    Ont enchanté le rêve épais et le loisir
    De celui qui t'apprit le stupide plaisir,
    Ô toi qui fus hier la soeur des Valkyries !

    L'époux montre aujourd'hui tes yeux, si méprisants
    Jadis, tes mains, ton col indifférent de cygne,
    Comme on montre ses blés, son jardin et sa vigne
    Aux admirations des amis complaisants.

    Abdique ton royaume et sois la faible épouse
    Sans volonté devant le vouloir de l'époux...
    Livre ton corps fluide aux multiples remous,
    Sois plus docile encore à son ardeur jalouse.

    Garde ce piètre amour, qui ne sait décevoir
    Ton esprit autrefois possédé par les rêves...
    Mais ne reprends jamais l'âpre chemin des grèves,
    Où les algues ont des rythmes lents d'encensoir.

    N'écoute plus la voix de la mer, entendue
    Comme un songe à travers le soir aux voiles d'or...
    Car le soir et la mer te parleraient encor
    De ta virginité glorieuse et perdue.


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  • Vous êtes mon palais, mon soir et mon automne,
    Et ma voile de soie et mon jardin de lys,
    Ma cassolette d'or et ma blanche colonne,
    Mon par cet mon étang de roseaux et d'iris.

    Vous êtes mes parfums d'ambre et de miel, ma palme
    Mes feuillages, mes chants de cigales dans l'air,
    Ma neige qui se meurt d'être hautaine et calme,
    Et mes algues et mes paysages de mer.

    Et vous êtes ma cloche au sanglot monotone,
    Mon île fraîche et ma secourable oasis...
    Vous êtes mon palais, mon soir et mon automne,
    Et ma voile de soie et mon jardin de lys.




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  • Pendant longtemps, je fus clouée au pilori,
    Et des femmes, voyant que je souffrais, ont ri.

    Puis, des hommes ont pris dans leurs mains une boue
    Qui vint éclabousser mes tempes et ma joue.

    Les pleurs montaient en moi, houleux comme des flots,
    Mais mon orgueil me fit refouler mes sanglots.

    Je les voyais ainsi, comme à travers un songe
    Affreux et dont l'horreur s'irrite et se prolonge.

    La place était publique et tous étaient venus,
    Et les femmes jetaient des rires ingénus.

    Ils se lançaient des fruits avec des chansons folles,
    Et le vent m'apportait le bruit de leurs paroles.

    J'ai senti la colère et l'horreur m'envahir.
    Silencieusement, j'ai appris à les haïr.

    Les insultes cinglaient, comme des fouets d'ortie.
    Lorsqu'ils m'ont détachée enfin, je suis partie.

    Je suis partie au gré du vent. Et depuis lors
    Mon visage est pareil à la face des morts.


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  • Je t'admire, et je ne suis que ton miroir fidèle
    Car je m'abîme en toi pour t'aimer un peu mieux ;
    Je rêve ta beauté, je me confonds en elle,
    Et j'ai fait de mas yeux le miroir de tes yeux.

    Je t'adore, et mon cœur est le profond miroir
    Où ton humeur d'avril se reflète sans cesse.
    Tout entier, il s'éclaire à tes moments d'espoir
    Et se meurt lentement à ta moindre tristesse.

    O toujours la plus douce, ö blonde entre les blondes,
    Je t‘adore, et mon corps est l'amoureux miroir
    Où tu verras tes seins et tes hanches profondes,
    Tes seins pâles qui font si lumineux le soir !

    Penche-toi, tu verras ton miroir tout à tout
    Pâlir ou te sourire avec tes mêmes lèvres
    Où trembleront encor tes mêmes mots d'amours ;
    Tu verras frémir des mêmes longues fièvres.

    Contemple ton miroir de chair tendre et nacrée
    Car il s'est fait très pur afin de recevoir
    Le reflet immortel de la Beauté sacrée...
    Penche-toi longuement sur l'amoureux Miroir !

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